Danseuse, chorégraphe, chanteuse, actrice, guitariste, percussionniste, écrivaine, fondatrice d’école (École de danse et d’échanges culturels) etc., Rose Marie Guiraud aura parcouru tous les interstices de l’ART avant de s’éteindre ce 20 avril 2020 d’un mal pernicieux qui la rongeait depuis plusieurs années.
Il est possible que les générations actuelles ne la connaissent pas, car son talent qui devrait la mettre au même diapason que des génies de l’art chorégraphique comme Nijinski, Anna Pavlova ou Joséphine Baker a souffert du manque d’engouement médiatique. Ainsi l’œuvre de Rose Marie Guiraud n’intéressait que les esthètes. Loin des pas de danses hystériques du coupé décalé et du zouglou, Rose Marie Guiraud avait hissé la danse traditionnelle au rang d’art majeur. Visitant et révisant toutes les danses traditionnelles du terroir en y ajoutant sa touche personnelle, son génie créateur.
Né, il y’a 75 ans à Ouyably petit village à l’Ouest de la Côte d’Ivoire, Rose Marie Guiraud s’était fait connaitre dans les années 70 avec sa troupe les « Guirivoires ».À cette époque où le dynamisme culturel ivoirien faisait de la Côte d’Ivoire, la place incontournable, elle s’était imposée comme une étoile singulière dans une constellation foisonnante. Dès lors, elle devient, un nom illustre, une référence, une icône arpentant le monde. De New-York à Paris, de Bamako à Liège, de Dakar à Tokyo, partout, elle fait sensation dans le petit milieu de la chorégraphie.
Ensuite, viennent les années de disette, l’étoile pâlit avec l’âge. Rose Marie Guiraud n’a plus ses jambes de vingt ans. Elle se consacre à la formation. Elle veut transmettre son savoir, celle qui a été touché par la grâce veut donner le trop-perçu. Avec ses chiches moyens, elle créé une fondation pour venir en aide aux enfants de la rue. Elle offre gîte et couvert, formation en danse, musique, chant, Rose Marie Guiraud qui dans sa jeunesse à tant souffert du manque de tout, sait l’importance du partage.
Il y’a deux ans, elle avait signé un livre autobiographique intitulé la survivante. Elle y retraçait son parcours, ses succès, ses échecs ainsi que ses perspectives.On y (re)découvre la résiliente, celle qui a essuyé tant et tant de railleries et de vilenies sur son physique, et qui a malgré tout, conservé son rire authentique, joyeux et contagieux. Une grande humaniste qui a surtout compris que la beauté, la vraie est la grandeur de l’âme. Adieu Rose Marie Guiraud, la Côte d’Ivoire peut se targuer d’avoir été l’hôte d’un génie.
Maury Legran