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De la lumière à l’ombre, que sont devenues les anciennes gloires de la musique ?

Ils ont fait la une de l’actualité. Les fans se bousculaient pour les voir et les toucher. Les médias les ont starifiés, le public les a idolâtrés. On ne parlait que d’eux, on ne voyait qu’eux, on n’entendait qu’eux… Et puis, du jour au lendemain, ils ont quitté la scène. Les projecteurs ont éclairé ailleurs, et le public a adulé d’autres personnes.

Que sont-ils devenus ? Où sont-ils ? Comment vivent-ils loin de la scène ?

Entre ceux qui ont le sentiment d’être victimes d’une insupportable injustice au vu de leur talent, ceux qui restent persuadés qu’ils vont, un jour ou l’autre, revenir au sommet et ceux qui se sont résignés à vivre en marge des médias, la vie après la gloire n’est pas toujours simple.

Jess Sah Bi et Peter One 

En 1985, Jess Sah Bi caricaturiste à Fraternité matin et Peter One, étudiant en histoire sortent un album qui tranche avec les airs musicaux du moment. Leur musique qui est un savant alliage de country et de sonorités rurales ivoirienne se nomme country-folk. C’est toute suite le succès. Un succès dont l’onde de choc s’étend partout en Afrique subsaharienne et même au delà. Le duo porté en triomphe, empile les spectacles et remplit des stades jusqu’au Togo. À la faveur de la libération de l’emblématique leader de L’ANC Nelson Mandela, la chaîne de radio BBC choisit le morceau African Chant pour célébrer cet événement historique. D’Abidjan à Johannesburg, de Bouaké à Pretoria, l’on entonne en chœur « African Chant« . C’est le summum de la consécration. En 1995, le duo décide de s’exiler au USA pour tenter le rêve américain. Vingt cinq ans après, les mélomanes ont encore en mémoire Clipo Clipo, Minmanle, Katin et bien d’autres titres qui ont fait le succès de Jess Sah Bi et Peter One.

Aujourd’hui, Jess Sah Bi qui vit à Philadelphie est revenu à ses premiers amours. Il est dessinateur pour film d’animation et consultant dans des écoles où il enseigne la culture africaine. Peter One, lui est infirmier à Nashvile, berceau de la Country Musique. Parallèlement à leurs nouvelles activités professionnelles, ils continuent de se produire de temps en temps dans des petites salles de spectacles au USA et au Canada et songent à un retour prochain sur la scène.

Monique Seka

Elle fait incontestablement partie de ce que la Côte d’Ivoire a produit de meilleur en matière de musique. Sa voix suave, sa silhouette diaphane et ses grands yeux en amande, ont fait d’elle une reine. La reine de l’afro zouk. De son temps, le public était exigeant et l’auto-tune qui sert aujourd’hui à corriger les défaillances vocales n’existait pas. Et si son compte d’artiste est crédité de huit albums qui ont tous obtenu les suffrages des mélomanes, c’est bien parce que Monique Seka avait du talent. Et aux Antilles, terre du zouk, elle est considérée comme une diva.

Après avoir fait les choux gras de la presse people des années durant, elle vit une vie paisible à Lyon avec son époux. De temps en temps, elle donne des spectacles mais, il n’est plus question pour elle de revenir sous les feux de la rampe.

Stezo et Rog Mel Never Fail

Pour les uns, Stezo le meilleur rappeur de Côte d’Ivoire. Pour d’autres, ce titre revenait à feu Almighty. Une chose est certaine, il a réussi avec son groupe La flotte impériale à écrire la plus belle histoire du rap ivoirien. Ses textes étaient appris par cœur par les jeunes et scandés lors de ses concerts. Le verbe de Stezo fonctionnait comme une cravache qui flagelle les maux et une matraque qui étourdi les défauts de la société. Stezo faisait déjà ce qu’on appelle aujourd’hui le rap conscient. Faisant sienne cette citation de Victor Hugo «  La musique, c’est le bruit qui pense« . Après un séjour en Europe, il est rentré au pays et est devenu Pasteur dans une église. Parallèlement à cela, il est chef d’entreprise. Son verbe et sa verve, il les met au service du Seigneur avec pour mission ramener les âmes perdues sur le droit chemin.

Rog Mel Never Fail quant à lui était un membre de la flotte impériale avec Stezo, DDF et bien d’autres. En français ou en anglais, Rog Mel Never Fail, composait des vers puissants. Après plusieurs années de tournées ici et dans la sous-région, Rog Mel Never Fail, a rangé la plume, troqué le t-shirt, baggy et baskets contre le costume cravate et souliers. Cadre à la CEI, ses nouvelles fonctions l’ont éloigné de la scène.

Daouda le Sentimental.

Vieux et jeunes, femmes et hommes, tout le monde connaît au moins un titre de lui. De sa musique se dégage une certaine bonhomie qui le rend tout de suite sympathique. Des textes simples, une musique douce, la voix soyeuse ont fait de lui un des plus grands chanteurs de ballades africaines. Et malgré le temps, sa musique n’a pris aucune ride. Bien au contraire, plus le temps passe et plus sa musique rajeunit.

Tous ses albums, sans exception ont été des succès. Daouda le sentimental était une machine à tubes. Au début des années 1990, contre toute attente, il part aux États-Unis ou il exerce le métier d’opérateur de machine à Greensboro en Caroline du Nord. Laissant les oreilles de ses nombreux fans orphelines de ses mélodies curatives.

Après plus d’une dizaine d’années aux États-Unis, il a tenté un retour sur la scène. Mais le succès a été mitigé. Aujourd’hui, il fait des aller-retours entre les USA son pays d’adoption et la Côte d’Ivoire, sa terre natale.

Bobby Yodé

Il se peut que vous n’arriviez pas à mettre un visage sur son nom. Mais il est impossible que vous ne connaissiez, le titre Ziopin qu’il a produit avec son groupe Les potes de la rue. Un titre qui est l’un des plus connus de la Côte d’Ivoire en partie grâce à la série satirique à succès Faut pas fâcher qui en a fait son générique. Après ce succès éclatant, Bobby Yodé, comme bien d’autres a cédé aux sirènes séduisantes de l’Europe et s’est envolé en France en 1998. De là-bas, il a sorti quelques titres en solo sans réitérer le succès. Confronté aux dures réalités de l’Europe, il met en suspend sa carrière musicale et vit de petits boulots. Paris, ville lumière qui s’est souvent faite fossoyeuse des aspirants à la gloire, l’a enseveli dans l’oubli de la mémoire collective.

Turay Mederic

Né en Côte d’Ivoire, Turay Mederic a grandi aux USA. C’est sans doute là qu’il a contracté le virus du hip-hop. De retour au pays, il se lance dans la musique. Naturellement, il opte pour le rap et parvient à se faire un nom. Son style d’un hip hop made in USA le distingue des autres faiseurs de rap. Ce qu’on sait moins, c’est que Turay Mederic est diplômé des beaux-arts de l’INSAAC. Aujourd’hui, cet amoureux des arts plastiques mène une brillante mais discrète carrière de plasticien et a même obtenu le prix du Meilleur Jeune Artiste de l’Afrique de l’Ouest. 

Nayanka Bell

Énormément de talent, une beauté d’une jeunesse hardie, beaucoup de charisme, Nayanka Belle est à n’en point douter, l’une des plus belles voix féminines de la Côte d’Ivoire. Son titre I wassado est un classique de la musique africaine contemporaine. Après, une carrière riche et de nombreuses récompenses, Nayanka Belle a mis fin à sa carrière musicale. Les raisons ? Des convenances personnelles et quelques ennuis de santé qui l’ont contraint à s’éloigner de la scène. Aujourd’hui, elle se consacre à la gestion de son complexe hôtelier au grand dam de ses nombreux fans.

Power et Turbo ou Bony Dagrou et Guy Vincent Kodja (Groupe RAS)

Dégaines de loubards, groove détonnant, Bony Dagrou et Guy Vincent Kodja ont fait danser plusieurs générations de jeunes dans les concerts et en nigths Club. D’agnangnan à kitaki, Bony Dagrou et Guy Vincent kodja ont enchaîné les succès. Et au début des années 2000, le duo qui caracole au sommet de la musique urbaine se sépare. Une querelle ? Absolument pas. Juste des nouveaux choix de vie.

  • Guy Vincent kodja, répond à l’appel à Dieu et devient pasteur. Il est aujourd’hui l »un des hommes de Dieu les plus en vu du pays.
  • Bony Dagrou lui vit en France où il a fondé une maison de sécurité mais aussi un studio d’enregistrement ou il arrange quelques disques. 

Sun Adams

Avant de d’essayer à la musique, il était producteur d’artistes, réalisateur de clips vidéo. Il y’a donc longtemps que Sun Adams traîne ses guêtres dans le milieu du show-business. Mais c’est la musique qui établi sa notoriété. Son titre « Dans la vie, tout se paye, ici bas » lui a permis de connaître un certain succès. Après cette brève incursion dans la chanson, Sun Adams est retourné dans les affaires. Véritable touche à tout, ses activités d’homme d’affaire sont aussi diverses que variées.

Shola Bobaraba

Elle n’avait pas froid aux yeux. Ses déhanchés lascifs et provocateurs, son sex-appeal avaient défrayé la chronique et en avait fait une sex-symbol. Mais, après quelques titres, celle qui fut une sulfureuse faiseuse du coupé-décalé, a définitivement mis un terme à sa carrière musicale. Aujourd’hui, elle est toujours au devant de la scène. Mais cette fois-ci en tant qu’animatrice radio et télé et actrice. Une reconversion pour le moins surprenante mais qui lui réussit bien.

Issa Sanogo et Roch Bi

Tous les deux ont connu une ascension fulgurante et une chute vertigineuse. Tous les deux ont succombés à des addictions diverses, se sont clochardisés avant de mourir dans des conditions pathétiques.

Issa Sanogo avait été un artiste précoce. Dès l’âge de 12 ans, il scintille aux côtés de la star Ernesto Djédjé, joue dans des films et fréquente le gratin d’Abidjan. À l’époque, c’est une star que tous les adolescents admirent, envient et adulent. Mais très vite, il est happé par les vices de toutes sortes et devient un intermittent de la maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca). De ces expériences carcérales, il fait des albums à succès puis retombe dans les travers qui l’y avait conduit. Ces derniers instants sur terre, il les passe dans le dénuement total.

Roch Bi fait parti de ce que les anglo-saxons appellent un « one-hit wonders » c’est à dire celui qu’un seul titre à propulser au sommet. Pour ce jeune rabatteur, le succès est lourd à porter. Grisé, il s’abandonne dans les bras des stupéfiants, se biture à l’alcool et vit très mal le désintérêt des médias. Réduit à vivre de la générosité d’âmes charitables, Roch Bi meurt dans une détresse crasse.

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